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Les unités de prévention WPIU pour soutenir la protection du bétail

8 juillet 2024
Aree Protette Alpi Marittime

L’ensemble du système agricole européen traverse une période complexe, caractérisée par de nouveaux défis et des problèmes structurels, notamment une concurrence accrue, une augmentation des coûts de production, des marchés volatils, une baisse de la demande de produits ovins, des procédures administratives complexes, un déclin général des services d’infrastructure rurale, des difficultés générales du travail agricole avec une main-d’œuvre importante pour des revenus faibles, et de nouveaux défis tels que le changement climatique, etc. comme l’illustrent diverses recherches (Schuman Paper n. 739/2024 ; Linnell et Cretois, 2018).

Dans cette situation déjà complexe, le rétablissement de la population de loups en Italie (et en Europe centrale et occidentale) au cours des dernières décennies est associé à un prix économique et social, parfois localement élevé, qui ne peut être ignoré, mais qui doit nécessairement être géré au mieux, dans le but de minimiser les impacts au détriment de la pratique de l’élevage, sans compromettre la survie à long terme du prédateur (ISPRA, 2022).

Des moutons en Carmagnola (CN). Archive LWA EU.

Comme le souligne le rapport « Efficacité des systèmes de prévention dans les Alpes dans les projets LIFE », les dommages sont plus fréquents dans les zones de recolonisation récente par les loups, où les mesures de prévention ou les stratégies de défense contre les attaques de loups sont peu susceptibles d’être mises en place, mais il existe des situations localisées dans les zones de recolonisation historique où les dommages restent fréquents.

En général, plusieurs facteurs contribuent au nombre d’événements de prédation, notamment l’utilisation ou la non-utilisation de stratégies de prévention et le type de mesures prises, les caractéristiques de l’environnement dans lequel les animaux paissent (par exemple, l’orographie et les conditions météorologiques) et la présence de structures et d’infrastructures (par exemple, des hangars et des routes). Il existe donc des zones difficiles à gérer et à protéger, où les événements de prédation sont plus susceptibles de devenir chroniques.

L’expérience de ces dernières années et d’autres projets (par exemple le Piedmont Wolf Project, LIFE DINALP BEAR et LIFE SloWolf) a montré que la présence de personnel technique spécialisé pour aider les éleveurs et les bergers à utiliser les systèmes de prévention et à intervenir à temps en cas d’attaques est fondamentale pour les aider à faire face à cette difficulté supplémentaire dans le secteur de l’élevage.

Les données collectées dans le cadre des projets montrent que dans la plupart des alpages, il est possible d’adopter des stratégies visant à réduire la vulnérabilité des troupeaux aux attaques de loups. Cependant, des solutions spécifiques doivent être définies au cas par cas sur le terrain avec les éleveurs et les bergers concernés, en tenant compte des différents types d’alpages, des objectifs de gestion et des autres caractéristiques énumérées ci-dessus.

Dans le cadre du projet LIFE WolfAlps EU, une nouvelle approche de « premiers secours » a donc été créée pour faciliter le contact direct et immédiat avec les agriculteurs dans les zones à loups. Les WPIU (Wolf Prevention Intervention Units) sont constituées d’opérateurs issus d’organismes publics ayant des formations et des qualifications différentes, afin d’assister efficacement les éleveurs en cas d’attaques de loups, de prévenir les dommages et d’évaluer l’efficacité des stratégies de prévention adoptées, en les améliorant et en proposant, en accord avec les éleveurs, des solutions ad hoc. A ce jour, il existe 43 WPIU le long des Alpes, dont 29 en Italie, 2 en France, 7 en Slovénie et 5 en Autriche. En Italie, les équipes opèrent en Ligurie (n. 4), une dans chaque province, au Piémont (n. 16) et en Lombardie (n. 5) dans toutes les provinces, dans le Val d’Aoste (n. 3), et une dans le Parc National des Dolomiti Bellunesi.

Sur les traces d’une unité WPIU : l’exemple de l’OFB en France

Les équipes ont plus que doublé depuis le début du projet, précisément pour pouvoir suivre de près les besoins des agriculteurs. Leur plus grande répartition sur le territoire et la meilleure connaissance de leur présence dans le monde agricole ont entraîné une augmentation des demandes d’intervention sur le terrain et à distance.

A ce jour, les WPIU ont réalisé plus de 1500 interventions à titre préventif, suite à une prédation, ou pour une évaluation de l’efficacité des mesures de prévention, avec une fréquence variable sur les différents territoires où elles opèrent.

Focus sur 2023

Dans le Piémont, en Italie, en 2023 et au cours des premiers mois de 2024, les WPIU sont intervenus à plus de 130 reprises principalement à des fins préventives (47%), et dans une moindre mesure suite à un événement prédateur (27,5%) et pour évaluer les mesures préventives mises en place (25,5%). Des kits de prévention ont été distribués en prêt gratuit, des systèmes de dissuasion acoustiques et fladry, des panneaux d’avertissement pour chiens de garde et des abreuvoirs ont également été installés pour le bétail dans les alpages, tant dans les Alpes maritimes que dans les Alpes Cottiennes.

Les unités de prévention WPIU pour soutenir la protection du bétail - Life Wolfalps EU

Abreuvoir situé dans un alpage, Alpi Marittime. Photo : Archives APAM.

Dans les provinces de Cuneo et Turin, on constate une légère augmentation de la prédation (100 animaux de plus qu’en 2022 pour un total de 1093 animaux prédatés), une situation due en partie à la nouvelle présence des loups dans les zones de collines et de plaines où les systèmes de prévention ne sont pas encore largement utilisés, et en partie à une augmentation des cas de prédation sur le bétail qui est encore mal protégé. En outre, le nouveau système d’indemnisation régional peut avoir incité les agriculteurs à déclarer des événements liés aux prédateurs qui n’étaient pas signalés auparavant, ce qui a entraîné une augmentation du nombre de déclarations. Dans les autres provinces, en revanche, le nombre d’attaques est resté inchangé ou a diminué.

Les dommages au bétail, en termes d’événements de prédation, concernent principalement les ovins et les caprins (82% du total), et dans une bien moindre mesure les bovins (15%). Bien qu’il s’agisse encore d’un pourcentage très faible, une légère augmentation des événements de prédation contre les bovins a été constatée au cours des dernières années. Cependant, comme l’illustre une étude récente dont nous avons parlé ICI, en développant des stratégies préventives ad hoc, même sur les animaux les moins exposés à la prédation, il est possible de réduire davantage le risque d’attaques de loups. Par exemple, étant donné qu’au Piémont la prédation sur les bovins se concentre sur les animaux de moins de 4 mois, il est d’une importance stratégique d’adopter des mesures spécifiques pour la défense des veaux, en gardant les vaches au vêlage à l’abri, en ne laissant pas les jeunes animaux isolés des adultes et en programmant les accouchements de manière à réduire les naissances et la présence de jeunes animaux dans l’alpage.

Comme mentionné ci-dessus, pour développer des systèmes de protection efficaces, il est important de prendre en compte les différents types de pâturages, les objectifs de gestion et d’autres caractéristiques environnementales. Dans la carte ci-dessous, il est possible d’observer que la densité de prédation est plus élevée dans certaines zones (Valle Chisone, Valle Pellice, Valle Grana) où les conditions spécifiques des pâturages individuels rendent les opérations de sécurisation du bétail complexes. Il est donc fondamental de soutenir les éleveurs, en particulier dans ces zones sensibles, afin qu’ils proposent des solutions efficaces pour réduire le risque de prédation.

Carte de la densité de prédation dans le Piémont en 2023. Source : ARVET, Regione Piemonte : ARVET, Région Piémont.

Dans la région du Val d’Aoste, les WPIU sont intervenus à 16 reprises et ont constaté une diminution de la méfiance des exploitations à l’égard des systèmes de protection et une plus grande propension à la défense active du bétail.

Les équipes ont mené à la fois des interventions préventives et des interventions suite à des attaques de loups chez des agriculteurs qui n’avaient pas mis en place de mesures de protection. Par exemple, dans la commune de Brusson, les techniciens sont intervenus pour soutenir deux éleveurs qui venaient de subir une attaque de loup. Dans un cas, des clôtures électrifiées ont été fournies car le troupeau n’avait aucune protection, tandis que dans l’autre cas, étant donné la conformation des zones de pâturage qui ne se prêtent pas à l’utilisation de filets de protection, il a été décidé d’acheter des bornes acoustiques/éclairantes.

Le travail s’est également poursuivi avec la distribution de panneaux d’information sur la présence de chiens de protection sur les pâturages (très appréciés), le soutien aux agriculteurs dans l’utilisation de ces chiens, et le travail d’information de la population sur le comportement à adopter en leur présence. Par exemple, les premiers mois de l’année ont été consacrés à la compréhension du comportement d’un chien de berger abruzzais de Maremmano appartenant à un éleveur de Courmayeur, qui s’est montré agressif envers le chien de berger. L’éleveur a mis en pratique toutes les indications qui lui ont été données et a réussi à résoudre le problème en quatre mois.

Le chien de berger Maremmano Avruzzese à Courmayeur. Photo : Archive Regione VDA/E. Bottinelli.

Dans le prochain article, nous aborderons les activités menées dans la région de Lombardie et dans le parc national des Dolomites de Belluno.